Depuis la rentrée de septembre j’ai le plaisir de travailler à Saint Nazaire avec Pascale Messu et Mathilde Mebkhouti alias Ph’îlot Mathilde, fondatrices des Escales Philosophiques dont j’ai déjà parlé dans ces pages.
L’objectif de notre collaboration est de répondre à des demandes de cycles d’ateliers nécessitant plusieurs animateurs, comme ce que nous faisons au collège Pierre Norange depuis la rentrée. Nous avons aussi pu expérimenter un atelier au Grand Café en binôme, avec Mathilde, dans le cadre de l’exposition d’œuvres de Noémie Goudal, à partir d’œuvres d’art contemporain, avec une classe de collégiens.
Dernièrement j’ai remplacé Mathilde au café associatif le Chantilly pour un café philo auquel participaient 8 adultes et une adolescente. Les thèmes sont choisis en amont avec les bénévoles du Chantilly. Pour ce rendez-vous nous avions pour base de réflexion : peut-on s’évader sans voyager?
La plupart des participants sont des habitués et, connaissant le sujet, ils avaient commencé à y réfléchir. Nous avions donc beaucoup de matière pour avancer sur les chemins de l’évasion et du voyage, d’autant plus que nous nous trouvions à une rue du chantier naval de Saint Nazaire et de ses immenses paquebots qui dépassent au dessus des maisons.
La pandémie à fait partie de la discussion car ses confinements et autres interdictions ont permis à un grand nombre d’entre nous ou de notre entourage de découvrir l’importance de certaines activités que nous faisions parce qu’elles nous manquaient ou la futilité d’autres et le besoin de changer de vie. Notre temps a changé nous permettant ainsi de faire connaissance avec une partie de nos vies méconnue. Nous retrouvions ainsi Pascal dans un Fragment Vanité :
« Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l’avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours, ou nous rappelons le passé pour l’arrêter comme trop prompt, si imprudents que nous errons dans les temps qui ne sont point nôtres et ne pensons point au seul qui nous appartient, et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste. C’est que le présent d’ordinaire nous blesse. Nous le cachons à notre vue parce qu’il nous afflige, et s’il nous est agréable nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l’avenir et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance pour un temps où nous n’avons aucune assurance d’arriver ».
« Que chacun examine ses pensées, il les trouvera toutes occupées au passé ou à l’avenir. Nous ne pensons presque point au présent, et si nous y pensons, ce n’est que pour en prendre la lumière pour disposer de l’avenir. Le présent n’est jamais notre fin. Le passé et le présent sont nos moyens, le seul avenir est notre fin. Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre, et nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais. »
Pascal
Tous les participants avaient de bons arguments pour s’évader sans voyager et les idées de lectures ont été partagées. Les récits d’échanges avec des personnes ayant vécu des expériences inédites ou simplement la rêverie et l’imagination sont autant de moyens de s’évader, voire même de partir dans un voyage immobile.
Ce café philo a été riche et agréable, le temps est passé vite et nous l’aurions prolongé si nous n’avions été appelés par d’autres obligations.
Le prochain café philo aura lieu le mercredi 16 février 2022 à 10h au Chantilly, à Saint Nazaire. Allez découvrir ce lieu qui regorge d’activités pour tous.
« La vie est ce que nous en faisons. Les voyages ce sont les voyageurs eux-mêmes. Ce que nous voyons n’est pas fait de ce que nous voyons mais de ce que nous sommes. »
Fernando Pessoa, le Livre de l’intranquillité